Kompass-Newsletter Nr. 34 – Decembre 2014

+++ Nouvelle revue d’Afrique-Europe-Interact +++ 18 déc. à Calais et Tunis +++ Chronologie de protestations variées en novembre et décembre +++ Rétrospective 2014 +++ Campagne contre le renforcement de la loi sur le droit d’asile +++ Grève de la faim des réfugiés*ées en Grèce +++ Alarm Phone: premier bilan intermédiaire +++ Perspective pour 2015: 7 janv. à Dessau, 6 fév. à Berlin, 18 mars à Francfort, fin mars au WSF à Tunis… +++

Chères amies et chers amis!

Si nous avions fait paraître notre newslettre au début du mois, comme nous le faisons d’habitude, nous aurions certes réussi à annoncer, juste à temps, les diverses actions de ces derniers jours, mais nous n’aurions guère eu le temps de mobiliser. C’est pour cela que nous avons décidé de faire paraître la newsletter exceptionnellement avec quelques jours de retard, ce qui nous permet de faire le bilan des dernières semaines et mois. La fin d’année est un moment opportun pour tenter un bilan et une évaluation, notamment afin d’esquisser des défis et perspectives possibles pour l’année à venir. Par conséquent, l’introduction est un peu plus longue cette fois-ci, d’autant plus qu’à la fin, nous ajoutons un mot au sujet de cette newslettre.

Mais procédons par ordre:
* Pas un jour ne passe sans des mouvements de protestation et de lutte contre le contrôle dominant des frontières: les dernières semaines étaient animées par une série impressionnante d’actions anti-racistes, et ce n’est pas rare qu’elles fassent la une des médias de masse. Cela va de l’action de la Première Chute du Mur Européen organisée par des artistes à Berlin, à la grève de la faim des Non-Citizens à Munich, de la manifestation contre la IMK (conférence des ministres de l’intérieur de la République fédérale) à Cologne, à l’endurant camp de protestation de réfugiés*ées du Soudan à Hanovre, de la campagne spontanée contre le durcissement des lois sur le droit d’asile, à l’asile accordé par l’église à Lampedusa in Hanau. Des actions de protestation symbolique et de résistance quotidienne attaquent, à différents niveaux, la politique migratoire dominante, en Allemagne et au-delà. C’est à titre d’exemples que nous évoquons, dans la longue liste de mini-rapports et liens ci-après, la réunion internationale de Sans-Papier et de migrants*tes qui s’est tenue à Rome, des grèves de la faim en Grèce et un rapport intermédiaire du projet transnational “Watch the Med Alarm Phone”.

* C’était une année très mouvementée et émouvante. Les nombreuses activités en novembre et décembre reflètent ce qui a marqué l’ensemble de l’année 2014: les frontières intérieures et extérieures de l’UE sont plus contestées que jamais, les luttes sociales et politiques de la migration se sont énormément densifiées. Le bilan ne peut être que contradictoire, étant donné la complexité du tableau d’ensemble.

D’une part, le nombre de réfugiés*ées et migrants*tes ayant atteint l’Europe est bien plus élevé que dans les années précédentes, et ce malgré la militarisation coordonnée par Frontex. Au moins en Allmagne, l’auto-organisation des réfugiés*ées s’est développée et son soutien a grandi, en passant par des activistes radicaux et radicales à des groupes de soutien bourgeois. Les réussites se font sentir:
d’innombrables déportations Dublin ont été arrêtées, que ce soit par des décisions de tribunaux, par l’asile de l’église, par des blocus et manifestations, ou même en dernière minute dans l’avion. Et voici ce qui est sans doute la preuve la plus évidente: à la mi-novembre, seulement environ 30 personnes se trouvaient dans les prisons de déportation allemandes. Autrefois, on les comptait par milliers. Jamais leur nombre n’a été aussi faible qu’aujourd’hui. Jamais l’emprisonnement pour dissuader et extorquer n’a été une arme aussi impuissante qu’elle l’est aujourd’hui. La position critique d’une part grandissante de l’opinion publique a contribué à ce que, depuis les événements d’octobre 2013, la politique migratoire dominante est régulièrement fondamentalement contestée, même par des médias de masse. Parmi les exemples les plus récents: même la criminalisation de la complicité de fuite a été critiquée dans un rapport exceptionnel de Panorama, et l’émission « Die Anstalt » a, après une brillante démonstration de l’isolation mortelle pratiquée par Frontex, abandonné le format du cabaret pour laisser chanter un choeur de réfugiés*ées syriens*iennes.

D’autre part, la violence étatique brutale aux frontières extérieures, en particulier dans la mer d’Égée et le long des barrières de Ceuta et Melilla, ne diminue pas, le nombre des décès dans le centre de la Méditerranée est plus élevé que jamais. Avec l’extension du concept de « pays d’origine sûrs » aux Balkans et avec le discours étatique de la “migration des pauvres”, les autorités allemandes renforcent la division entre, d’un coté, les “bons” réfugiés*ées qui seraient légitimes et, de l’autre coté, les “mauvais” réfugiés*ées qui ne le seraient pas. Et la décision actuelle du cabinet de la grande coalition vise l’expansion de la prison de déportation et des interdictions de retour sévères pour renforcer la dissuasion. À cela s’ajoute la mobilisation croissante de la droite. Les succès électoraux du parti allemand AfD (“Alternative Pour l’Allemagne”) reflètent le sarracynisme répandu, et, sous la forme de Hogesa (« Houligans contre les salafistes”) et Pegida (“Européens patriotiques contre l’islamisation de l’Occident”), la droite occupe les rues.

La polarisation de la société se répand de plus en plus depuis plusieurs mois: alors que de plus en plus de personnes essaient de transformer leur compassion abstraite en un soutien concret, un mélange de xénophobie et de haine envers l’Autre se forme à droite. Cette polarisation apparait comme un enjeux et une chance à la fois: le recul indispensable des manifestations racistes du lundi serait resté relatif et défensif, dans la mesure où le paquet de lois répressives prévues, mentionnées ci-dessus, n’aurait pas été en même temps pris en tenaille dans les semaines suivantes et, s’il ne peut pas être bloqué, au moins qu’il soit désamorcé. L’opinion publique critique serait donnée, et également la force potentielle du mouvement. Cependant, le spectre d’activistes antiracistes a l’air de ne pas être réussir à s’organiser. Les efforts fournis, que ce soit à Noborder last forever à Francfort en février, lors de la marche à Bruxelles en juin ou lors du 20ème anniversaire de Voice à Jena en octobre, n’ont pas (encore) portés leurs fruits. De même que la diversité serait à traduire en stratégies efficaces de mise en pratique, elle reste de ce fait un enjeu central pour 2015.
Le deuxièm enjeu réside dans la combinaison et l’expansion de questions sociales et de société supplémentaires. Il y a de bonnes approches également dans ce domaine. Que ce soit sur la question du pillage des terres traitées par Afrique-Europe-Interact, sur les manifestations de solidarité actuelles pour Rojava ou sur la crise, le travail précaire et la grêve précaire avec Blockupy, il y a de nombreuses lignes de connections qui seraient à renforcer pour continuer à développer une large perspective émancipatoire avec les luttes pour la liberté de mouvement.

* Pour finir, encore quelques mots sur des thèmes particuliers: notre newslettre apparait presque depuis trois ans au début de chaque mois, et depuis quelques numéros également en anglais et en français. Les traductions apparaissent en général quelques jours plus tard, mais il nous est important de continuer la publication en trois langues afin que des réfugiés*ées et migrants*tes puissent participer plus amplement à ce projet d’échange et de collecte d’informations. Cependant, la question d’une large participation reste présente. Certe, nous recevons quelques encouragements et beaucoup d’entre nous pensent que la rédaction régulière et largement diffusée d’une newslettre est important. Mais jusqu’à présent, nous sommes restés*ées en tant qu’équipe de production dans un cercle fermé, et la plupart du temps nous devons courir après les rapports ou annonces d’évènements. C’est pour cela que nous avons besoin d’actifs et d’actives venant de différents spectres pour nous envoyer volontairement de courts textes et informations qui seront ensuite traduits et publiés. Ce serait le plus beau cadeau pour le troisième anniversaire de la newslettre en mars, si quelques personnes supplémentaires pourraient soutenir le projet de newslettre de Kompass à long terme.

Cordialement,
l’équipe Kompass

Kompass-Newsletter Nr. 34 (francais, pdf)